Du temps d’Homos Habilis, il était impossible de vivre seul. Ceux qui s’aventuraient à la périphérie de la tribu s’exposaient à la fois aux prédateurs, à un risque accru de famine et à une mort prématurée. Par conséquent, tout comme les autres créatures sociales, l’homme a développé des réactions biologiques spécifiques aux menaces sociales.
Un animal social qui se sent isolé de ses semblables développe une nervosité et des réponses physiologiques inadaptées. Le corps se met à produire davantage de toxines liées au stress, conduisant à l’inflammation et à un affaiblissement du système immunitaire.
Ces réponses adaptatives de l’organisme pourraient nous aider à expliquer pourquoi de nombreux individus souffrant de solitude chronique produisent beaucoup plus de toxines liées au stress et ont un système immunitaire affaibli. Mais la façon dont ils perçoivent le monde, la façon dont leurs pensées sont affectées, pourrait tout aussi bien être une autre conséquence de la solitude…
Cette conclusion est étayée par une étude menée par des chercheurs du centre de Neurosciences de l’université de Chicago. Ces derniers ont commencés avec un groupe de jeunes volontaires sains à qui un questionnaire visant à mesurer leur niveau de solitude a été remis.
32 ont été classés comme socialement bien intégrés
38 comme étant isolés, solitaires, se percevant comme manquant de liens sociaux intimes
Tous les participants ont ensuite été équipés de capteurs ayant pour but d’enregistrer l’activité électrique de leur cerveau puis ont été amenés à regarder des mots clignoter sur un écran d’ordinateur.
Certains de ces mots reflétaient des émotions primaires qui étaient soit positives soit négatives, comme « Plaisir » ou « Souffrance ». D’autres mots se référaient ouvertement aux interactions sociales positives et négatives ; « Intégré» ou « Rejeté » par exemple.
Chez les participants isolés les aires cérébrales impliquées dans l’attention s’activaient beaucoup plus rapidement suite à l’exposition à des mots reliés à l’isolement social tels que « exclu », « ennemi » ou « détaché » en comparaison à l’exposition à des mots négatifs comme « frustré » ou « vomi ». Aucune différence n’a été remarquée chez les autres participants.
Par ailleurs, les résultats démontrent que les participants isolés se sont montrés beaucoup moins engagés par des mots à connotation positive par rapport aux participants socialement bien intégrés. A noter que ces résultats sont restés les mêmes après avoir isolé des variables comme la dépression (les participants solitaires ne sont pas nécessairement déprimés et vice versa).
Cette étude révèle que plus un individu est isolé plus son attention va être attirée par des informations sociales négatives. Les personnes seules semblent être, à leur insu, hypervigilantes aux menaces sociales. Cela signifie que la solitude pousse l’individu à agir sans le savoir, d’une manière plus défensive et hostile envers ceux avec qui il aimerait tisser des liens.
Il y a des leçons à tirer de cette étude, à la fois par ceux qui sont isolés et par les autres. Elles semblent maintenant moins simplistes dans la mesure ou elles sont soutenues par la recherche. Soyez chaleureux avec les râleurs que vous rencontrez et invitez les à partager un moment autour d’un café. Et s’il vous arrive d’être le râleur, acceptez cette invitation sans redouter qu’un prédateur ne surgisse de nulle part pour vous nuire !
Sources : G. Reynolds, J. Cacioppo
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